12.19.2015

Le Deuil

Le Deuil by Laetitea
Meurtrie au Trocadéro, vide, où le silence absolu gît, pour un hommage très intime aux victimes du terrorisme.


Pour les meilleurs experts en sécurité il ne fait pas de doute que un grand nombre d'organisations font appel à la violence (inacceptable) pour faire avancer leur cause ou en retirer des profits. Indépendants du lieu et de l'époque, ces affrontements sanglants sont intolérables ! Plus que jamais le terrorisme sera l'affaire de stratégies antiterroristes hautement spécialisées. D'autre part on a pris son temps pour ne pas engager à la légère un combat mal préparé. En septembre 2006, afin de renforcer et d'améliorer ces activités, les États Membres ont ouvert un nouveau chapitre de la lutte antiterroriste en convenant d'une stratégie mondiale. Cependant, la lecture des actualités récentes laisse à penser que des modifications d'attitude vis-à-vis du terrorisme et de son combat pourraient se dessiner. Nous tentons maintenant de faire le point sur la situation actuelle. Mais quand la décision est prise, l'action doit être précise et brutale. Les moyens de combat se sont diversifiés et alourdis, l'importance de stratégies complexes s'est affirmée. Même s'il est imprévisible et parfois sans rapport avec l'objet de la menace, nous sommes tous engagés à condamner le terrorisme sous toutes ses formes et dans toutes ses manifestations.

Les choses que l'on découvre de façon négative laissent toujours un mauvais souvenir. Je n'ai jamais trempé ma liberté dans des récipients politiques, dans quelque mouvement que ce soit, loin s'en faut, et leur concédant tout mon respect bien entendu, je compte bien rester maîtresse de moi-même sans m'égarer dans ce domaine. Bien sûr, le lobbying ça aide à grimper plus haut, mais je suis comme ça et j'ai bien l'intention de le rester. Dans les métiers comme le mien, on vous cherche toujours la petite bête, dans mon cas elle semble donc moins parrainée, soit, mais elle est « libre ». Les trois grands principes de ma carrière sont la passion, le respect du public et la liberté. Cela dit, pour en revenir au terrorisme, pour moi ce n'est pas trop difficile de me mettre dans la peau des autres. Là aussi, dans mon métier, cela m'aide à comprendre et à décrire des émotions, des sensations, des faits. Même si la vraie Laetitea, je ne la connais peut-être pas moi-même puisque j'aurais du mal à me décrire.

Je le dis constamment, j'ai toujours été sensible au fait que les gens admettent rarement de se reconnaître tels qu'ils sont. À partir du moment où ils refusent d'être ce qu'ils sont, ils veulent devenir quelqu'un d'autre, et ça les entraîne à la folie. Et je crois que le mal est là. Qu'est-ce qui pousse quelqu'un à ouvrir le feu sur la foule ? Comment peut-on comprendre une telle démence ? Qui sont ces individus, probablement aveuglés par la recherche de l'audience des foules, jusqu'à ce qu'ils découvrent l'existence du protagonisme macabre ?! L'irrationnel frappé par la folie ! Il est le pilote d'un véhicule fou, sans commandes, qui veut s'écraser héroïquement contre un tas d'innocents. Dans son affolement, ce jeune d'une vingtaine ou trentaine d'années, alourdi de conflits psychologiques, est prêt à entendre les conseils les plus ignobles, à se laisser influencer par une monstruosité pathologique hors-série. Pourquoi certaines personnes (la plupart, Dieu merci) sont-elles sensibles à la souffrance d'autrui, d'autres pas ?! Les perceptions psychologiques des principaux sujets ont une tonalité dépressive commune et entraînent des réactions comportementales différentes. Ce vide séméiologique entraîne la nécessité de recherches portant sur certains individus vulnérables et limités à des fractions réduites de la population. Des interrogations se posent. La réponse ne se trouve certainement pas sur le champ de bataille.

Quelle que soit la réponse exorcistique, elle est entretenue par des faits hélas trop réels. La sensibilité des sociétés occidentales devant l'angoisse et la souffrance humaines a fait récuser les attitudes religieuses ou fatalistes des siècles passés et poser en termes nouveaux les questions du respect de la vie. La bombe d'Hiroshima est également ici sujet de réflexion. Si déprimant qu'en soit l'aveu, on ne peut nier que la moralité soit lourde et que certaines personnes, atteintes d'une pathologie par exemple, souffrent de façon intolérable. À notre époque, une femme qu'on ampute d'un sein, un malade à qui on fait des perfusions et qui perd ses cheveux, un fumeur à qui on enlève un lobe pulmonaire et qu'on irradie au cobalt comprennent la croisade contre un ennemi redoutable - qui ne s'apparente à aucun autre - dont on ne connaît ni la nature ni le traitement spécifique. Dans le cancer comme dans le terrorisme, la prévention apparaît au public comme une solution idéale. Suivant l'adage, il vaut mieux prévenir que guérir.

Les journalistes les plus sérieux ont tendance, par métier, à rechercher les effets de plume ou de parole. D'autres, moins pointilleux sur leurs sources, font la part trop belle aux illuminés et aux charlatans pour qui le terrorisme, ou un quelconque titre à la une, est un sujet de prédilection. Les émissions de télévision où sont invités des experts deviennent souvent pour eux des pièges : face à des pacifistes accusateurs ou à des incompétents bavards, ils n'ont à opposer que la vérité terne de leur honnêteté. La presse, la télévision, exploitant le sensationnel tout en sachant que la médiatisation d'une menace, déjà dramatique par elle-même, comporte toujours une part de réalité et une part d'imaginaire, quel devrait être leur rôle dans la lutte antiterroriste ?! Les interrogations se posent aussi sur l'ordre dans lequel il convient de procéder vis-à-vis des news à sensation propagées par les médias. Encore faut-il prendre garde de substituer un culte mythique à un autre, celui de l'information à celui du mystère. Le tabou du terrorisme est nuisible, mais la parole maladroite peut-être aussi malfaisante que le silence.

Tout compte fait, je n'y comprends absolument rien. Quand j'additionne mes insuffisances, je me rend compte qu'à mon âge je sais bien peu de choses et que, dans ces conditions, étant donné que l'homme ayant par le développement de son intelligence universaliste la capacité de se soucier des plus faibles de ses congénères, l'attente du respect miraculeux entre humains s'apparente à un acte de foi. Même si elle n'aboutit qu'à une paix bâtarde et fragile. Sous prétexte politique, religieux ou tout simplement professionnel (croyez-moi), que l'être humain est capable de perfectionner toutes stratégies minables pour atteindre des objectifs encore plus minables, nous devrions tous en être conscients. Il demeurera dérisoire de prétendre prévenir la violence, terroriste où pas, en légiférant contre des risques marginaux tant qu'on ne s'attaquera pas sérieusement aux valeurs, idéaux où principes qui définissent notre société. Que puis-je attendre d'une société dressée sous l'aile hiérarchique de l'apparence, l'individualisme et l'ostentation ?! De nos jours, le succès dans ces trois ordres d'activité est en bonne voie. L'affection, quant à elle, bien peu experte en science économique et sagement installée dans un coin, l'évolution l'a découronnée et même reléguée au rang d'une incommodité triviale. L'insensibilité est à présent, à la fatalité de son évolution, une tragédie à laquelle nous sommes tous mêlés.

Justement, avant de vous quitter et vous remercier de votre fidélité, je tiens à vous dire que... malgré mon long « break »... non, je ne vous ai pas oublié !

Joyeuses Fêtes / Boas Festas !

Laetitea